“Lampedusa libera”. Cette affirmation est répétée plusieurs fois sur les murs de l’île le plus au Sud de l’Union européenne (son territoire arrive au 35ème parallèle et elle a un passé géologique commun avec l’Afrique). Au Sénat, et ,ce qui est le plus incroyable, dans les listes de la Lega, une femme de Lampedusa a obtenu le siège de Bologna après avoir donné preuve, il y a quelques années, d’une sympathie pour Bossi. C’était un acte qui voulait être une provocation pour souligner que cette petite île vit dans l’abandon et n’est pas considérée au pair de la Sicile. Une provocation qui, finalement, a produit un vote au Sénat et il faut donc en féliciter les auteurs qui ont fait preuve d’intuition et de fantaisie… Les représentants de la Lega ont perdu leur réputation de antisudistes et la population de Lampedusa – qui a voté unie pour Berlusconi, tant aux élections politiques que aux régionales –a trouvé un point d’appui au Nord, tout en sachant qu’une demande d’annexion à la Lombardie n’est pas chose simple, bien que les « lùmbard » apprécieraient sans doute de pouvoir vanter des plages. En ce cas, je conseille à Bossi de songer à Linosa, minuscule et aussi propre qu’un canton suisse, genre Tessin, en opposition à une Lampedusa qui est caractérisée par des situations de dégradation (du territoire et des architectures) qui dépriment. Presque tous les jours les journaux télévisés nos proposent l’image d’une Lampedusa qui est le lieu d’arrivée de toutes ces personnes sans espoir qui viennent du Sud du monde, et les symboles assument parfois des formes extravagantes. Sur des rochers près du port on a récemment installé une œuvre d’art contemporaine : il s’agit d’une sorte de porte d’entrée en Europe, qui devrait représenter le destin que cette île – plus voisine des côtes de la Tunisie que de celles de la Sicile- connaît et a connu dans ces dernières années. Les différentes « mafie » du monde ont découvert à quel point il est rentable de profiter du désir des pauvres du Tiers Monde de gagner l’Europe, pour fuir la misère de leurs Pays d’appartenance. Lampedusa fait l’affaire mieux que d’autres localités, parce qu’elle est plus près de l’Afrique d’une part, et parce que, comme avant-poste de l’Europe, elle est une sorte de porte-avions du désespoir. Les clandestins sont placés dans des bateaux plus ou moins petits le long des côtes du Maghreb et ils sont repérés par les radars, par les hélicoptères qui contrôlent le territoire ou même grâce aux coups de fil qu’ils passent avec leurs portables à la Garde-côte, pour annoncer leur arrivée. Evidemment ils ont déjà entendu le slogan « italiens braves gens » et ils connaissent notre bon accueil à propos duquel il ne changent pas d’avis, même face à une criminalité mafieuse qui, née dans le Sud de l’Italie, se répand partout dans le monde. Les opérations humanitaires se déroulent le soir ou pendant la nuit, pour éviter de déranger les touristes qui séjournent à Lampedusa, qui découvrent fort rarement que, tout près de l’aéroport, des centaines de personnes attendent de savoir ce qu’on fera d’eux : certains seront expulsés, d’autres (moins nombreux) auront droit à l’asile politique. Au même moment à quelques kilomètres de distance, les écologistes de Lega Ambiente et du WWF s’inquiètent de la reproduction des tortues, avec un grand engagement et en vigilant sévèrement sur le destin des œufs. La preuve d’un peu de confusion dans la liste des priorités, mais on le sait, c’est ainsi que va le monde.